Droits d’auteur

Vue d’ensemble

L’expression d’une idée, telle une œuvre d’art visuel ou sonore, ainsi que les logiciels peuvent être protégés par droit d’auteur.

Nos services incluent notamment :

  • la recherche de titres de droit d’auteur,
  • la préparation, le dépôt et la poursuite de demandes d’enregistrement au Canada et à l’étranger et
  • l’analyse en matière de contrefaçon et de validité ;

Sans compter nos conseils en P.I. ainsi que nos services en litige et arbitrage et contrats, titres et revues diligentes reliés aux droits d’auteur.

  1. C-244 : Déverrouiller la réparation des biens

    Le 7 novembre dernier, le projet de loi C-244 intitulé Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (diagnostic, entretien et réparation)1 a reçu la sanction royale, ajoutant une nouvelle exception à l’encadrement des mesures techniques de protection (MTP) par la Loi sur le droit d’auteur (LDA). Cette modification législative introduit l'article 41.121 à la LDA, permettant désormais le contournement des MTP pour l'entretien, la réparation et le diagnostic des produits. Constat L’impact réel du nouvel article 41.121 sur le marché de la réparation au Canada est limité. Malgré l’amendement à la LDA, il demeure interdit pour les réparateurs de recourir aux services d’un spécialiste en contournement de MTP, et le matériel spécialisé à ces fins reste prohibé. Par ailleurs, bien qu’un réparateur puisse désormais contourner les MTP pour diagnostiquer, entretenir ou réparer l’appareil d’un client, les risques de contrefaçon de droit d’auteur persistent, puisque l’amendement omet d’introduire une exception d’utilisation équitable à ces fins. De plus, certaines questions demeurent en suspens : quelle sera, par exemple, la portée attribuée par les tribunaux aux termes « entretien » et « réparation »? L’exception permet-elle de mettre à niveau un appareil selon de nouvelles normes ou de le réparer à l’aide de pièces plus performantes, ou le réparateur doit-il se limiter à entretenir l’appareil uniquement selon les spécifications d’origine? Pensons, par exemple, au cas d’un appareil connecté rendu obsolète par l’adoption d’une nouvelle norme de sécurité : sa mise à jour constituera-t-elle un entretien? Bref, l’adoption du projet de loi C-244 est un pas timide vers le droit à la réparabilité des biens, témoignant des défis de concilier droit de propriété des biens et droit de propriété intellectuelle. Modifications apportées par C-244 L’article 41.121, tel qu’introduit par C-244 se décline en trois paragraphes : Diagnostic, maintien et réparation 41.121 (1) L’alinéa 41.1(1)a) ne s’applique pas à la personne qui contourne une mesure technique de protection dans le seul but d’effectuer tout entretien ou toute réparation sur un produit, y compris tout diagnostic connexe, duquel fait partie une œuvre, une prestation fixée au moyen d’un enregistrement sonore ou un enregistrement sonore dont l’accès est contrôlé par la mesure technique de protection. Précision (2) Il est entendu que le paragraphe (1) s’applique à la personne qui, dans les circonstances prévues à ce paragraphe, contourne la mesure technique de protection pour une autre personne. Exclusion (3) Ne peut toutefois bénéficier de l’application du paragraphe (1) la personne qui, dans les circonstances prévues à ce paragraphe, accomplit un acte qui constitue une violation du droit d’auteur. Ce nouvel article écarte ainsi la protection des MTP à des fins d’entretien et de réparation, y compris tout diagnostic connexe. Le paragraphe 41.121(2) précise que cette exception s’applique également à la personne qui effectue la réparation pour une autre personne, par exemple un réparateur professionnel. Le paragraphe 41.121(3) précise, quant à lui, que cette exception n’est applicable que dans les situations où il n’y a pas de contrefaçon de droit d’auteur; par exemple, une personne qui contournerait les MTP à des fins de réparation, mais qui en profiterait pour faire une copie illicite d’un programme d’ordinateur. Le projet de loi C-244 réintroduisait certaines dispositions du projet de loi C-2722, déposé en septembre 2020 puis abandonné à la suite des élections fédérales de 2021. Toutefois, contrairement au texte d’origine, le changement adopté le 7 novembre dernier ne permet pas la fabrication, l’importation et la distribution d’appareils permettant le contournement de MTP en vue d’effectuer des réparations, et se limite plutôt à permettre le geste du contournement lui-même. Origine du problème Rappelons que le projet C-272 était en quelque sorte une réponse à l’affaire Nintendo of America Inc. c. King3, qui avait considérablement refroidi l’industrie de la réparation d’appareils munis de MTP. Dans cette affaire, la Cour fédérale avait accordé 11,7 millions de dollars en dommages-intérêts préétablis (« statutory damages ») en faveur de Nintendo of America Inc. pour le contournement de ses MTP, soit 20 000 $ pour chacun des 585 jeux touchés, en plus d’ajouter 1 million de dollars en dommages-intérêts punitifs. Les MTP, également connus sous le nom de verrous numériques ou de DRM (« Digital Rights Management »), sont des dispositifs ou des technologies utilisés pour protéger les droits d'auteur et les informations sensibles dans le domaine numérique. Ils servent généralement à contrôler l'accès, la copie, la modification et la redistribution de contenus numériques tels que des fichiers audio, vidéo, des logiciels, des livres électroniques, etc. Les MTP peuvent prendre diverses formes, notamment des codes d'accès, des mots de passe, des clés de chiffrement, des filigranes numériques (« watermark »), des signatures numériques, des techniques de cryptage, des protections matérielles intégrées, etc. Elles sont souvent intégrées dans les fichiers eux-mêmes ou dans les appareils qui les lisent, les stockent ou les diffusent. Le chiffrement des DVD et la protection des cartouches de jeux vidéo en sont des exemples bien connus. À l’origine, l’encadrement des MTP avait été proposé par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), alors qu’on craignait que la montée en popularité d’Internet entrainerait une forte croissance de la contrefaçon du droit d’auteur4. En 1999, les États-Unis ratifiaient cet encadrement suite à l’adoption du Digital Millennium Copyright Act (DMCA), suivis, en 2014, par le Canada suite à l’entrée en vigueur de la Loi sur la modernisation du droit d’auteur5. Cet amendement législatif introduisait notamment l’article 41.1 à la LDA, qui interdit depuis le contournement des MTP.De nos jours, les MTP se trouvent dans les voitures, les tracteurs, les implants médicaux, les cartouches d'imprimante, les consoles de jeux, les petits appareils électroniques et bien d’autres objets. L’octroi de 11,7 millions de dollars en faveur de Nintendo of America Inc. sur la base de cette disposition a eu l’effet d’une douche froide sur l’industrie de la réparation6. En réponse à cette décision, le projet de loi C-272 proposait une exception à l’interdiction de contourner les MTP à des fins de diagnostic, d'entretien et de réparation (référant à l’interdiction énoncée à l’alinéa 41.1(1)a) de la LDA), ainsi qu’une exception permettant la fabrication, l’importation ou la fourniture de produits permettant de contourner les MTP à des fins de diagnostic, d'entretien et de réparation (référant ici à l’interdiction énoncée à l’alinéa 41.1(1)c) de cette même loi). Harmonisation avec l’Accord Canada-États-Unis-Mexique La portée du nouvel article 41.121, introduit par le projet de loi C-244, a toutefois été considérablement restreinte afin d’éviter les conflits avec l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM). L’article 20.66 de l’ACEUM prévoit en effet que les pays membres doivent adopter trois catégories d’interdictions en lien avec les MTP : l’interdiction d’offrir des services de contournement de MTP, l’interdiction de fabriquer, d’importer ou de distribuer des appareils pouvant servir au contournement de MTP, et l’interdiction même de contourner les MTP. Le cinquième paragraphe de l’article 20.66 prévoit certaines exceptions pour chacune de ces catégories, notamment pour des motifs d’interopérabilité, de recherche sur le chiffrement (sécurité) et d’activités gouvernementales – qui, pour la plupart, sont prévues aux articles 41.11 et suivants de la LDA – mais il ne prévoit pas d’exception pour la réparation des biens. L’exception prévue à l’article 41.121 a donc été circonscrite à la troisième catégorie de l’ACEUM : l’interdiction même de contourner les MTP, prévue à l’alinéa 41.1(1)a). Les interdictions d’offrir des services de contournement et de fabriquer, d’importer ou de distribuer des appareils permettant le contournement, prévues respectivement aux alinéas 41.1(1)b) et 41.1(1)c), demeurent donc inchangées, même dans un objectif de réparation. Une nouvelle ambiguïté Nos collègues juristes partageront peut-être notre malaise quant aux modifications apportées aux définitions de l’article 41. Le législateur, en tentant de préciser l’applicabilité de la nouvelle disposition, semble plutôt avoir semé une nouvelle confusion par l’ajout de deux expressions contradictoires aux définitions de contourner et de mesure technique de protection, qui n’étaient pourtant pas nécessaires. Avant Après Mesures techniques de protection et information sur le régime des droits Définitions 41 Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article et aux articles 41.1 à 41.21. contourner a)        S’agissant de la mesure technique de protection au sens de l’alinéa a) de la définition de ce terme, éviter, supprimer, désactiver ou entraver la mesure — notamment décoder ou déchiffrer l’œuvre protégée par la mesure — sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur; Mesures techniques de protection et information sur le régime des droits Définitions 41 Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article et aux articles 41.1 à 41.21. contourner a)        S’agissant de la mesure technique de protection au sens de l’alinéa a) de la définition de ce terme, éviter, supprimer, désactiver ou entraver la mesure — notamment décoder ou déchiffrer l’œuvre ou le programme d’ordinateur protégés par la mesure — sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur; b)        … b)        … mesure technique de protection Toute technologie ou tout dispositif ou composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement : a)        soit contrôle efficacement l’accès à une œuvre, à une prestation fixée au moyen d’un enregistrement sonore ou à un enregistrement sonore et est autorisé par le titulaire du droit d’auteur mesure technique de protection Toute technologie ou tout dispositif ou composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement a)        soit contrôle efficacement l’accès à une œuvre, y compris un programme d’ordinateur, à une prestation fixée au moyen d’un enregistrement sonore ou à un enregistrement sonore et est autorisé par le titulaire du droit d’auteur; b)        … b)        … Dans le premier cas, on précise que la définition s’applique dans le cas de « l’œuvre ou [du] programme d’ordinateur protégés par la mesure », ce qui laisse sous-entendre qu’un programme d’ordinateur ne constitue pas une œuvre… alors que dans la seconde définition, on indique plutôt « une œuvre, y compris un programme d’ordinateur », ce qui sous-entend le contraire. La clarification n’était pourtant pas nécessaire, puisque la définition d’« œuvre » comprend les œuvres littéraires, et que l’article 2 de la LDA prévoit expressément que les programmes d’ordinateur sont assimilés aux œuvres littéraires. Il est dommage que malgré plusieurs interventions lors des examens parlementaires7, ce texte ait été ultimement adopté tel quel. Balancer droit de propriété (des biens) et droit de propriété intellectuelle Les débats entourant ce changement législatif témoignent bien de la difficulté de trouver un équilibre dans l’affaiblissement du droit de propriété des biens (et du droit de les réparer) au profit des droits de propriété intellectuelle. Par exemple, l'Association canadienne du logiciel de divertissement a plaidé pour l’exclusion des consoles de jeux de cette nouvelle exception8. Selon Paul Fogolin, vice-président, Politique et affaires gouvernementales de cette association, une ouverture trop large au droit à la réparation des biens mettrait en péril l’industrie du jeu vidéo en rendant presque impossible pour les titulaires de droits de poursuivre en justice ceux qui trafiquent leurs dispositifs de protection9. Charles Bernard, économiste principal pour l’Association des concessionnaires d'automobiles du Canada s’inquiétait des risques associés au vol automobile10. Pour sa part, Catherine Lovrics, présidente du Comité de politique du droit d'auteur, Institut de la propriété intellectuelle du Canada, entrevoyait des risques en lien avec la cybersécurité11. Selon plusieurs intervenants de l’industrie, la mise à disposition de documents, de logiciels, de pièces et d’outils en vue d’une réparation augmenterait les risques de cyberattaques. Des risques semblables sont rapportés par des représentants de l’industrie aux États-Unis. Par exemple, l’Association of Equipment Manufacturers suggère que la possibilité de contourner les MTP pourrait compromettre les contrôles d'émissions sur les équipements, ce qui pourrait entraîner des infractions environnementales et des risques pour la vie humaine12. D’autres s’inquiètent des enjeux de responsabilité du fabricant13. Selon Apple et Panasonic, les produits électroniques d'aujourd'hui sont trop complexes pour être réparés par des personnes non spécialisées14. Ainsi, accorder un droit à la réparation élargi pourrait compromettre la sécurité des consommateurs. Les préoccupations en lien avec la sécurité, la sûreté et la responsabilité sont certes légitimes, mais on peut se questionner à savoir si le droit de la propriété intellectuelle est le bon outil pour y répondre. Shannon Sereda, directrice des relations gouvernementales, des politiques et des marchés des commissions du blé et de l'orge de l'Alberta, a notamment mis en lumière les risques que représentait pour les agriculteurs l’impossibilité de réparer rapidement eux-mêmes leur équipement. Selon elle, « [TRADUCTION] l'environnement législatif actuel au Canada soutient les monopoles de réparation d'équipement en permettant aux fabricants d'origine (OEM) d'interdire le contournement des MTP15. » Ces propos ont été corroborés par, Anthony D. Rosborough, chercheur au Département de droit de l'Institut universitaire européen, qui déplorait que les MTP « fonctionnent principalement pour protéger les technologies, plutôt que les œuvres ou les droits des auteurs ». Selon lui, l’industrie tente parfois de protéger par droit d’auteur ce qui devrait être protégé par brevet ou secret commercial16. L’assouplissement des règles relatives aux MTP fait écho à des mesures semblables déjà adoptées aux États-Unis. En effet, le 28 octobre dernier, le Librarian of Congress a renouvelé une série d’exceptions à l’article 1201 du Digital Millennium Copyright Act (DMCA), dont l’une permet de contourner certains moyens de protection à des fins de réparation 17. Ces exceptions sont renouvelables tous les trois ans, mais elles ont été, jusqu’à présent, renouvelées deux fois depuis 201818. Les États-Unis ont entrepris plusieurs mesures pour promouvoir la réparabilité des biens depuis quelques années. En mai 2021, la Federal Trade Commission (FTC) a déposé un rapport détaillé19 sur diverses pratiques anticoncurrentielles en matière de droit à la réparation. Le 9 juillet 2021, peu après ce rapport, le président américain a émis un décret présidentiel pour lutter contre ces pratiques et favoriser le développement d’un marché de réparation par des tiers ou par les propriétaires20. Depuis, plusieurs États ont adopté des lois visant à promouvoir le droit à la réparation21. Le 8 janvier 2023, John Deere s'est également engagé à permettre la réparation de son équipement par des réparateurs indépendants22. Apple Inc., qui historiquement s'opposait à l'élargissement du droit à la réparation, a finalement changé de position en 2022, en lançant un service de réparation en libre-service et en appuyant publiquement la nouvelle loi californienne portant sur le droit à la réparation23. L’année dernière, l’OMPI rapportait que 40 États américains avaient entrepris des propositions de loi en faveur du droit à réparer24. Chez nous, l’adoption du projet de loi C-244 s’inscrit également dans l’émergence d’un droit à la réparation des biens. Cette mesure s’ajoute, en ce sens, à un autre projet de loi fédéral, C-5925, adopté en juin dernier et modifiant la Loi sur la concurrence afin de permettre aux tribunaux de contraindre un fournisseur à vendre des outils de diagnostic ou de réparation. Au niveau provincial, rappelons que, l’an dernier, Québec devenait la première province à se doter d’une loi en matière de droit à la réparation26. Nous pourrons observer, au cours des prochains mois, si le nouvel article 41.121 de la LDA permettra de déverrouiller le marché de la réparation. Pour l’instant, la mesure nous parait plutôt timide.27 Parlement du Canada, « LEGISinfo : C-244 : Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (diagnostic, entretien et réparation) », Parlement du Canada, en ligne : https://www.parl.ca/legisinfo/fr/projet-de-loi/44-1/c-244. Parlement du Canada, « LEGISinfo : C-272 : Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (diagnostic, entretien et réparation) », Parlement du Canada, en ligne : https://www.parl.ca/legisinfo/fr/projet-de-loi/43-2/c-272. Nintendo of America Inc. v. King, 2017 FC 246, [2018] 1 FCR 509. Traité de l'OMPI sur le droit d'auteur, 20 décembre 1996, article 11, en ligne : https://www.wipo.int/wipolex/fr/treaties/textdetails/12740. Loi sur la modernisation du droit d’auteur, L.C. 2012, ch. 20, sanctionnée le 2012-06-29, en ligne : https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/LoisAnnuelles/2012_20/TexteComplet.html. Gazette du Canada, vol. 146, no 23 — le 7 novembre 2012, TR/2012-85 Décret fixant plusieurs dates d’entrée en vigueur de diverses dispositions de la loi, C.P. 2012-1392, le 25 octobre 2012, en ligne : https://canadagazette.gc.ca/rp-pr/p2/2012/2012-11-07/html/si-tr85-fra.html. Graham J. Reynolds, Of Lock-Breaking and Stock Taking - IP, Climate Change, and the Right to Repair in Canada, dans 2023 101-1 Canadian Bar Review 32, 2023 CanLIIDocs 1144, p. 54, en ligne : https://canlii.ca/t/7n4cj. Comité de l'industrie et de la technologie, 5 décembre 2022, Catherine Lovrics, Open Parliaments, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/49/catherine-lovrics-2/; Comité de l'industrie et de la technologie, 15 février 2023, Viviane Lapointe, Open Parliaments, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/59/viviane-lapointe-5/; Comité de l'industrie et de la technologie, 15 février 2023, Andy  Fillmore, Open Parliaments, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/59/andy-fillmore-6/; Comité de l'industrie et de la technologie, 15 février 2023, Patrick Blanar, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/59/patrick-blanar-1/. Association canadienne du logiciel de divertissement, Bill C-244 – An Act to amend the Copyright Act (diagnosis, maintenance and repair), en ligne : https://www.ourcommons.ca/Content/Committee/441/INDU/Brief/BR12209146/br-external/EntertainmentSoftwareAssociationOfCanada-e.pdf. Comité de l'industrie et de la technologie, 8 février 2023, Paul Fogolin, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/57/paul-fogolin-1/. Comité de l'industrie et de la technologie, 8 février 2023, Charles Bernard, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/57/charles-bernard-1/. Comité de l'industrie et de la technologie, 5 décembre 2022, Catherine Lovrics, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/49/catherine-lovrics-2/. Emma Fillman, Comprehensive Right to Repair: The Fight Against Planned Obsolescence in Canada, (2023) 32 Dalhousie J Legal Stud 123, p. 145. Irene Calboli, Le droit de réparer : évolution récente aux États-Unis d’Amérique, Magazine de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, août 2023, en ligne : https://www.wipo.int/wipo_magazine_digital/fr/2023/article_0023.html. Emma Fillman, Comprehensive Right to Repair: The Fight Against Planned Obsolescencein Canada, (2023) 32 Dalhousie J Legal Stud 123, p. 142 et s., en ligne : https://digitalcommons.schulichlaw.dal.ca/djls/vol32/iss1/5/. Comité de l'industrie et de la technologie, 8 février 2023, Shannon Sereda, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/57/shannon-sereda-1/. Comité de l'industrie et de la technologie, 8 février 2023, Anthony D. Rosborough, en ligne : https://openparliament.ca/committees/industry/44-1/57/anthony-d-rosborough-1/. Copyright Office, Library of Congress, Exemption to Prohibition on Circumvention of Copyright Protection Systems for Access Control Technologies», Federal Register, 28 octobre 2024, en ligne : https://www.federalregister.gov/documents/2024/10/28/2024-24563/exemption-to-prohibition-on-circumvention-of-copyright-protection-systems-for-access-control. Copyright Office, Library of Congress, Exemption to Prohibition on Circumvention of Copyright Protection Systems for Access Control Technologies», Federal Register, 26 octobre 2018, en ligne : https://www.federalregister.gov/documents/2018/10/26/2018-23241/exemption-to-prohibition-on-circumvention-of-copyright-protection-systems-for-access-control. Federal Trade Commission, Nixing the Fix: An FTC Report to Congress on Repair Restrictions, mai 2021, en ligne : https://www.ftc.gov/system/files/documents/reports/nixing-fix-ftc-report-congress-repair-restrictions/nixing_the_fix_report_final_5521_630pm-508_002.pdf. The White House, Executive Order on Promoting Competition in the American Economy, 9 juillet 2021, en ligne : https://www.whitehouse.gov/briefing-room/presidential-actions/2021/07/09/executive-order-on-promoting-competition-in-the-american-economy/. X, Jon Campbell, 29 décembre 2022, en ligne : https://twitter.com/JonCampbellNY/status/1608327624526548993; Colorado General Assembly, Consumer Right to Repair Agricultural Equipment, 25 avril 2023, en ligne : https://leg.colorado.gov/bills/hb23-1011; Minnesota Legislature, Minnesota Session Laws, 93rd Legislature, Chapter 57 – S.F. No. 2744, en ligne : https://www.revisor.mn.gov/laws/2023/0/Session+Law/Chapter/57/; Sidley, California Becomes Third U.S. State to Join the Right-to-Repair Movement, 24 octobre 2023, en ligne : https://www.sidley.com/en/insights/newsupdates/2023/10/california-becomes-third-us-state-to-join-the-right-to-repair-movement. John Deere, Memorandum of Undestanding, 8 janvier 2023, en ligne : https://www.fb.org/files/AFBF_John_Deere_MOU.pdf. The Verge, Surprise : Apple now supports California’s right to repair, 23 août 2023, en ligne : https://www.theverge.com/2023/8/23/23843506/apple-california-right-to-repair-sb-244. Irene Calboli, « Le droit de réparer : évolution récente aux États-Unis d’Amérique », Magazine de l’Organisation mondiale de la Propriété intellectuelle, en ligne : https://www.wipo.int/wipo_magazine_digital/fr/2023/article_0023.html. Parlement du Canada, « LEGISinfo : C-59 : Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023 », Parlement du Canada, en ligne : https://www.parl.ca/legisinfo/fr/projet-de-loi/44-1/c-59. Assemblée nationale du Québec, « Projet de loi n° 29, Loi protégeant les consommateurs contre l’obsolescence programmée et favorisant la durabilité, la réparabilité et l’entretien des biens » en ligne : https://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-29-43-1.html. L'auteur tient à remercier Laura Trépanier-Champagne pour son travail au soutien de la rédaction de cette publication

    Lire la suite
  2. Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC): Hausse des tarifs

    L’OPIC a annoncé qu’elle hausserait ses tarifs à compter du 1er janvier 2024. Il s’agira d’une hausse d’au moins 25 % par rapport aux tarifs en vigueur actuellement. Cette hausse visera non seulement les marques de commerce, mais également les brevets, les dessins industriels et les droits d’auteurs. À titre d’exemple, les tarifs officiels à prévoir pour la production d’une demande d’enregistrement de marque de commerce passeront de 347,35 $ à 458,00 $ pour la première classe, et de 105,26 $ à 139,00 $ pour chacune des classes additionnelles. La majorité des autres tarifs de l’OPIC feront également l’objet d’un rajustement similaire. Ainsi, cette hausse se fera sentir non seulement au moment de déposer une demande d’enregistrement, mais aussi tout au long du processus d’enregistrement et au moment du renouvellement. Par conséquent, nous vous recommandons de passer en revue votre portefeuille de propriété intellectuelle afin de déterminer si de nouvelles demandes d’enregistrement devraient être déposées ou des renouvellements effectués avant la fin de l’année. L’OPIC signale que cette hausse contribuera au soutien de sa stratégie en matière de propriété intellectuelle visant à offrir des services comparables à ceux offerts à l’échelle mondiale. Nous espérons qu’elle aura aussi pour effet de réduire les délais!

    Lire la suite
  3. Intelligence artificielle en entreprise : gérer les risques tout en tirant profit des bénéfices?

    À l’heure même où certains exigent une suspension temporaire de la recherche en intelligence artificielle et du développement de systèmes avancés et que d’autres souhaitent remettre le génie dans la bouteille, on peut se demander quel sera l’effet des technologies conversationnelles (ChatGPT, Bard et autres) au sein des entreprises et en milieu de travail. Certaines entreprises en encouragent l’usage, d’autres les interdisent, mais beaucoup n’ont toujours pas pris position. Nous croyons qu’il est impératif que toute entreprise adopte une position claire et guide ses employés en ce qui a trait à l’usage de ces technologies. Avant de décider quelle position adopter, une entreprise doit être consciente des différents enjeux juridiques liés à l’usage de ces formes d’intelligence artificielle. Si l’entreprise décide d’en permettre l’usage, elle doit alors être en mesure de bien encadrer cet usage et surtout les résultats et les applications qui en découleront. Force est de constater que de tels outils technologiques présentent à la fois des avantages non négligeables susceptibles de soulever les passions, pensons notamment à la rapidité avec laquelle ces technologies conversationnelles réussissent à fournir une information à la fois surprenante et intéressante, et des risques indéniables quant aux avancées qui peuvent en résulter. Nous résumons dans le présent texte quelques risques qui, à très court terme, guettent les entreprises, ainsi que leurs clients, employés et partenaires, dans le cadre de leur utilisation de ces outils. Risques d’erreurs et responsabilité Les médias ont abondamment relaté les errances et les inexactitudes des robots conversationnels qui génèrent du texte. Dans certains cas, on parle même « d’hallucinations », où le robot conversationnel invente une réalité qui n’existe pas. Cela n’est pas surprenant. D’une part, ces technologies s’abreuvent à l’Internet, qui est truffé de désinformation et d’inexactitudes, et d’autre part, on s’attend à ce que ces robots conversationnels « créent » de nouveaux textes. Ils n’ont pas, pour le moment du moins, de balises suffisantes pour utiliser cette « créativité » uniquement à bon escient. On peut facilement imaginer des situations où un employé utiliserait une telle technologie pour produire du contenu destiné à être utilisé par son employeur à des fins commerciales. Surgit alors un danger évident pour l’entreprise si des mesures de contrôle appropriées ne sont pas mises en place. Le contenu ainsi généré pourrait s’avérer erroné, et ce d’une manière à tromper les clients de l’entreprise. Ce risque serait particulièrement important si le contenu ainsi généré fait l’objet d’une diffusion, par exemple en étant affiché sur le site web de l’entreprise ou utilisé dans une campagne de publicité. Dans un tel cas, l’entreprise pourrait vraisemblablement être responsable du préjudice ainsi causé par son employé, celui-ci s’étant fié à une technologie qu’on sait défaillante. Cet enjeu de fiabilité de ces outils, surtout lorsqu’ils sont utilisés de façon peu encadrée, demeure à ce jour l’un de plus préoccupant. Diffamation Imaginons qu’une telle information erronée concerne de surcroît une personne connue ou une entreprise concurrente. D’un point de vue juridique, une entreprise qui diffuse un tel contenu sans mettre en place des balises pour s’assurer que des vérifications adéquates ont été faites pourrait s’exposer à des poursuites en diffamation ou pour publicité trompeuse. Il semble donc impératif d’adopter des mesures faisant en sorte que tout contenu tiré de ces technologies soit minutieusement validé avant tout usage commercial. Plusieurs auteurs suggèrent que les résultats générés par un tel outil d’intelligence artificielle devraient davantage servir d’aide pour l’analyse et la prise de décision, que de produits ou résultats finaux. Cependant, la vitesse à laquelle les entreprises adopteront ces outils et en bénéficieront, notamment sur le plan concurrentiel, pourrait devancer la vitesse à laquelle les bonnes pratiques et la réglementation viendront les gouverner. Enjeux de propriété intellectuelle Les robots conversationnels qui émergent ont été développés en vue de constituer des extensions aux moteurs de recherche du web, tels Google et Bing. Il est possible que le contenu généré par les robots conversationnels s’inspire de contenus web déjà existants et assujettis à des droits d’auteur, et qu’il en reprenne même parfois des portions substantielles.  Cela pourrait entraîner une violation de droits d’auteur. Si l’utilisateur limite son usage à des fins de recherche interne, le risque est alors limité puisque la loi prévoit une exception pour un usage équitable dans un tel contexte. Par contre, si son intention est de diffuser le texte à des fins commerciales, il y a un risque de violation de droits d’auteur. Ce risque est particulièrement présent lorsqu’on demande à un robot conversationnel de générer du contenu sur un sujet ciblé pour lequel il existe peu de références sur le web. Une autre question pour laquelle les réponses ne sont pas encore claires est celle de savoir qui détiendra les droits sur les réponses et les résultats découlant d’un tel outil, notamment si ces réponses et ces résultats font l’objet de diverses adaptations ou modifications avant leur ultime utilisation. Enjeux de confidentialité et de protection des renseignements personnels À la lecture de leurs modalités et conditions d’utilisation, la plupart de ces technologies conversationnelles ne semblent pas prévoir un usage qui soit confidentiel. Il est donc impensable de leur révéler des secrets commerciaux ou des renseignements confidentiels. Qui plus est, ces technologies ne sont pas conçues pour recevoir ni pour protéger des renseignements personnels conformément aux lois et règlements applicables dans les juridictions où elles pourraient être utilisées. Leurs propriétaires se dégagent généralement de toute responsabilité à cet égard. Autres enjeux Quelques autres enjeux importants méritent d’être soulignés parmi ceux qu’il est possible d’anticiper à ce jour. Premièrement, les possibles biais discriminatoires que certains attribuent aux outils d’intelligence artificielle, lorsque combinés avec le peu de règlementation de ces outils, peuvent entrainer des conséquences significatives pour divers groupes de la population. Deuxièmement, on ne peut pas passer sous silence les nombreux enjeux éthiques associés aux applications d’intelligence artificielle qui seront développées dans divers secteurs (médecine, justice, politique, etc.).  Les enjeux seront d’autant plus grands lorsque ces mêmes applications seront utilisées dans des juridictions où les lois, les coutumes et la culture (économiques, politiques et sociales) sont différentes. Enfin, les risques de conflit ne peuvent pas être ignorés. Qu’il s’agisse de conflits entre groupes prônant différentes valeurs, entre organisations ayant des objectifs opposés, ou même entre nations, il est difficile de prédire si et comment les avancées en matière d’intelligence artificielle permettront de solutionner ou d’apaiser de tels conflits ou si au contraire elles les envenimeront. Conclusion Ces technologies conversationnelles présentent un grand potentiel, mais soulèvent aussi des enjeux juridiques sérieux. À court terme, il semble peu probable que ces outils puissent légitimement se substituer au jugement humain, lui-même imparfait. Mais tout comme l’a fait la révolution industrielle il y a deux siècles, l’arrivée de ces technologies entraînera des changements importants et rapides au sein des entreprises. Il est important de préparer dès maintenant des politiques visant à encadrer l’usage de ces technologies au sein de votre entreprise. De plus, si votre entreprise doit intégrer une telle technologie dans le cadre de ses activités, nous vous recommandons de procéder à une étude attentive de ses modalités et conditions d’utilisation afin de vous assurer qu’elles sont compatibles avec le projet et les objectifs que votre entreprise souhaite réaliser grâce à elle.

    Lire la suite
  4. Arrêt SOCAN : une seule redevance doit être payée par les diffuseurs de musique en ligne

    Dans l’arrêt Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. Entertainment Software Association1 (l’« Arrêt SOCAN »), la Cour suprême du Canada s’est prononcée quant à l’obligation de verser une redevance pour la mise à disposition du public d’une œuvre sur un serveur en vue de sa diffusion ou son téléchargement ultérieur. Par le fait même, elle clarifie la norme applicable en appel lorsque les cours de justice et les organismes administratifs ont des compétences concurrentes en première instance et elle revisite les objectifs de la Loi sur le droit d’auteur2 et son interprétation à la lumière du Traité de l’OMPI sur le droit d’auteur3. La Cour suprême en profite également pour réitérer l’importance du principe de neutralité technologique quant à l’application et l’interprétation de la LDA. Ce rappel est transposable à d’autres médiums artistiques et il est d’une très grande actualité dans un contexte où le marché des arts visuels numériques connaît un engouement particulièrement important, notamment avec la production et la vente de jetons non fongibles (« NFT »). En 2012, les autorités législatives canadiennes ont modifié la LDA en adoptant la Loi sur la modernisation du droit d’auteur4 afin d’intégrer au droit canadien les obligations du Canada en vertu du Traité et plus particulièrement, d’harmoniser le régime juridique canadien en matière de droit d’auteur avec les règles internationales relatives aux technologies nouvelles et émergentes. La LMDA a introduit trois articles relatifs à la « mise à la disposition » dont l’article 2.4 (1.1) LDA s’appliquant aux œuvres originales et clarifiant l’article 3(1)f) qui confère aux auteurs le droit exclusif de « communiquer au public, par télécommunication, une œuvre » : 2.4 (1.1) LDA. « Pour l’application de la présente loi, constitue notamment une communication au public par télécommunication le fait de mettre à la disposition du public par télécommunication une œuvre ou un autre objet du droit d’auteur de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement. » Avant l’entrée en vigueur de la LMDA, la Cour suprême a également conclu que le téléchargement d’une œuvre musicale sur Internet n’était pas une communication par télécommunication au sens de l’article 3(1)f) LDA5 alors que les diffusions en continu étaient visées par cet article6. Suivant l’entrée en vigueur de la LDMA, la Commission du droit d’auteur du Canada (la « Commission ») a reçu des observations concernant l’application de l’article 2.4 (1.1) LDA. La Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (« SOCAN ») y soutenait notamment que l’article 2.42.4 (1.1) LDA obligeait les utilisateurs à payer des redevances lorsqu’une œuvre était publiée sur Internet, ne faisant aucune distinction entre le téléchargement de l’œuvre, sa diffusion en continu et le cas des œuvres publiées, mais jamais transmises. La position de la SOCAN avait pour conséquence qu’une redevance devait être versée chaque fois qu’une œuvre était mise à la disposition du public, qu’elle soit téléchargée ou diffusée en continu. Ainsi, pour chaque téléchargement, une redevance de reproduction devait être payée et pour chaque diffusion en continu, une redevance d’exécution devait être payée. Historique judiciaire Décision de la Commission7 La Commission retient l’interprétation de la SOCAN voulant que la mise à la disposition du public d’une œuvre est une « communication ». Selon cette interprétation, deux redevances sont ainsi dues lorsqu’une œuvre est publiée en ligne : dans un premier temps lorsqu’elle est mise à la disposition du public en ligne et dans un second temps, lorsqu’elle est diffusée en continu ou téléchargée. Cette décision de la Commission reposait en grande partie sur son interprétation de l’article 8 du Traité selon laquelle l’acte de « mise à la disposition d’une œuvre » nécessite une protection distincte des États membres, justifiant une rémunération. Arrêt de la Cour d’appel fédérale8 Entertainment Software Association, Apple inc. et leurs filiales canadiennes (les « Diffuseurs ») ont porté la Décision de la Commission devant la Cour d’appel fédérale (« CAF »). S’appuyant sur la norme de la décision raisonnable, la CAF infirme la décision de la Commission affirmant qu’une redevance est due seulement lorsque l’œuvre est mise à la disposition du public sur un serveur et qu’aucune redevance n’est due ensuite pour la diffusion en continu. La CAF souligne par ailleurs l’incertitude quant à la norme de contrôle applicable en appel suivant l’arrêt Vavilov9ths pour un cas où un organisme administratif a une compétence concurrente aux cours de justice en première instance. Arrêt SOCAN La Cour suprême rejette le pourvoi de la SOCAN qui lui demande de rétablir la Décision de la Commission. Norme de contrôle en appel La Cour suprême reconnaît être en présence de circonstances rares et exceptionnelles donnant lieu à la création d’une sixième catégorie de questions pour lesquelles la norme de la décision correcte trouve application, soit la compétence concurrente en première instance entre les organismes administratifs et les cours de justice. L’article 2.4 (1.1) LDA donne-t-il droit au versement d’une seconde redevance à chaque téléchargement ou diffusion continue après sa publication sur un serveur pour que l’œuvre soit accessible au public ? Les droits conférés par l’article 3(1) LDA La Cour suprême commence son analyse en considérant les trois droits conférés par la LDA, soit les droits prévus à l’article 3(1) LDA : de produire ou reproduire une œuvre sous une forme matérielle quelconque; d’exécuter l’œuvre ou de la représenter en public; ou de publier une œuvre non publiée. Ces trois droits sont des droits distincts et une activité ne peut être rattachée qu’à un seul de ces droits. Par exemple, l’exécution de l’œuvre est passagère et permet à l’auteur de conserver un plus grand contrôle sur leurs œuvres que les reproductions. Ainsi, « le droit de l’auteur à l’égard de l’exécution entre en jeu pendant la période limitée où l’utilisateur profite de l’œuvre lors de l’activité. Une reproduction, en revanche, donne à l’utilisateur une copie durable de l’œuvre. »10 La Cour suprême souligne par ailleurs qu’une activité qui ne fait pas intervenir l’un des trois droits de l’article 3(1) LDA ou les droits moraux de l’auteur n’est pas protégée par la LDA et pour cette raison, aucune redevance ne doit être versée en lien avec cette activité. La Cour rappelle ses enseignements antérieurs voulant que le téléchargement ou la diffusion en continu d’une œuvre correspond pour chaque cas de figure à une activité distincte protégée, soit la reproduction pour les téléchargements et l’exécution pour la diffusion en continu. Elle souligne également que le téléchargement n’est pas une communication visée à l’article 3 (1)f) LDA et que la mise à disposition d’une œuvre sur un serveur n’est pas une activité distincte des trois droits justifiant rémunération.11 Objet de la LDA et principe de la neutralité technologique La Cour suprême critique la Décision de la Commission en ce qu’elle viole le principe de neutralité technologique, notamment en exigeant que les utilisateurs paient des redevances additionnelles pour accéder aux œuvres en ligne. La LMDA avait pour objectif d’« éliminer la spécificité technologique des dispositions de la LDA »12 et de marquer, par le fait même, l’adhésion du Canada au principe de la neutralité technologique. Le principe de neutralité technologique est expliqué plus en détail par la Cour suprême : [63] Selon le principe de la neutralité technologique, en l’absence d’une intention contraire du Parlement, la Loi sur le droit d’auteur ne devrait pas être interprétée de manière à favoriser ou à défavoriser une forme de technologie en particulier : SRC, par. 66. La distribution d’œuvres équivalentes sur le plan fonctionnel par des moyens technologiques anciens ou nouveaux devrait mettre en jeu les mêmes droits : Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. Bell Canada, 2012 CSC 36, [2012] 2 R.C.S. 326, par. 43; SRC, par. 72. Par exemple, l’achat d’un album en ligne devrait faire intervenir les mêmes droits, et donner lieu aux mêmes redevances, que l’acquisition d’un album effectuée dans un magasin physique, étant donné que ces façons d’acheter les œuvres protégées par le droit d’auteur sont équivalentes sur le plan fonctionnel. Ce qui compte, c’est ce que l’utilisateur reçoit, et non la manière dont il le reçoit : ESA, par. 5-6 et 9; Rogers, par. 29. Dans son sommaire de la LMDA, lequel précède le préambule, le Parlement a signalé son adhésion au principe de la neutralité technologique en déclarant que les modifications visaient à « éliminer la spécificité technologique des dispositions de la [Loi sur le droit d’auteur] ». La Cour suprême affirme que le principe de neutralité technologique doit être observé à l’aune des objectifs de la LDA qui n’existe pas uniquement pour la protection des droits des auteurs, mais afin d’établir un équilibre entre les droits des utilisateurs et les droits des auteurs, en facilitant la diffusion des œuvres artistiques et intellectuelles afin d’enrichir la société et d’offrir une inspiration aux autres créateurs. Par conséquent, « ce qui compte, c’est ce que reçoit l’utilisateur, et non la manière dont il le reçoit. »13 Ainsi, que la reproduction ou la diffusion de l’œuvre ait lieu en ligne ou hors ligne, les mêmes droits d’auteur s’appliquent et donnent lieu aux mêmes redevances. Quelle est la bonne interprétation de l’article 2.4 (1.1) LDA ? L’article 8 du Traité La Cour suprême rappelle que les traités de droit international sont pertinents à l’étape du contexte en matière d’interprétation législative et qu’ils peuvent être examinés sans qu’il y ait d’ambiguïté dans le texte d’une loi14. Par ailleurs, si le texte de la loi le permet, elle devra être interprétée conformément aux obligations du Canada découlant du traité selon la présomption de conformité selon laquelle un traité ne peut pas évincer l’intention claire du législateur15. Elle conclut que l’article 2.4 (1.1) LDA avait pour but de mettre en œuvre les obligations du Canada résultant de l’article 8 du Traité et que, par conséquent, le Traité doit être pris en compte dans l’interprétation de l’article 2.4 (1.1) LDA. Même si l’article 8 du Traité confère aux auteurs le droit de contrôler la mise à la disposition du public des œuvres, il ne crée pas un nouveau « droit de mise à la disposition » protégé et donc justifiant une rémunération. Ainsi, il n’en découle pas des « communications distinctes » ou autrement dit, des « exécutions distinctes » 16. L’article 8 du Traité ne crée que deux obligations qui sont : « protéger les transmissions sur demande; et conférer aux auteurs le droit de contrôler comment et quand leur œuvre est mise à la disposition du public pour téléchargement ou diffusion en continu. »17 Le Canada a la liberté de choisir la manière dont ces deux objectifs sont mis en œuvre dans la LDA en recourant soit au droit de distribution, au droit de communication au public, à une combinaison de ces deux droits ou à un nouveau droit18. La Cour suprême conclut que la LDA donne effet aux obligations découlant de l’article 8 du Traité au moyen d’une combinaison des droits en matière d’exécution et représentation, de reproduction et d’autorisation prévus à l’article 3 (1) LDA et respectant le principe de neutralité technologique19. Quelle est l’interprétation de l’article 2.4 (1.1) LDA qui doit être retenue ? L’objectif de l’article 2.4 (1.1) LDA est de préciser le droit de communication visé à l’article 3(1)f) LDA en soulignant qu’il s’applique aux diffusions en continu sur demande. Une unique diffusion en continu sur demande à un membre du public constitue ainsi une « communication au public » telle que l’entend l’article 3(1)f) LDA20. L’article 2.4(1.1) LDA précise qu’une œuvre est exécutée dès qu’elle est mise à la disposition pour diffusion sur demande21. Par conséquent, la diffusion en continu n’est que le prolongement de l’exécution de l’œuvre qui débute avec sa mise à disposition et une seule redevance doit être perçue en lien avec ce droit : [100] Cette interprétation n’exige pas que l’acte de mise à la disposition de l’œuvre soit considéré comme une exécution distincte de la transmission subséquente de l’œuvre par la diffusion en continu. L’œuvre est exécutée dès qu’elle est mise à la disposition pour diffusion en continu. Une redevance d’exécution doit être payée à ce stade. Si l’utilisateur profite subséquemment de cette exécution en diffusant l’œuvre en continu, il bénéficie d’une exécution déjà en cours, et non d’une nouvelle exécution. Aucune redevance distincte ne doit être payée à ce stade. [traduction] « L’acte de “communication au public” sous la forme d’une “mise à la disposition” est entièrement accompli par la simple mise à la disposition d’une œuvre pour diffusion en continu sur demande. Si l’œuvre est alors effectivement transmise de cette façon, cela ne signifie pas que deux actes sont accomplis : la “mise à la disposition” et la “communication au public”. L’acte entier ainsi accompli sera considéré comme une communication au public » : Ficsor, p. 508. Autrement dit, la mise à la disposition d’une diffusion en continu et une diffusion en continu par un utilisateur sont toutes les deux protégées en tant qu’exécution unique — une communication unique au public. Pour résumer, la Cour suprême a affirmé et clarifié les éléments suivants dans l’Arrêt SOCAN : L’article 3(1)f) LDA ne vise pas le téléchargement d’une œuvre; La mise à disposition d’une œuvre sur un serveur et sa diffusion en continu subséquente constitue la mise en œuvre du seul et même droit à l’exécution de l’œuvre; Conséquemment, une seule redevance doit être versée pour une œuvre versée sur un serveur et qui est ensuite diffusée en continu; Cette interprétation de l’article 2.4(1.1) LDA respecte les obligations internationales du Canada en matière de protection du droit d’auteur; La question de la compétence concurrente en première instance entre les cours de justice et les organismes administratifs est celle de la décision correcte. Alors que les créations artistiques de l’intelligence artificielle se multiplient et qu’un nouveau marché de l’art visuel numérique émerge, propulsé par l’engouement pour les plateformes d’échanges NFT, l’importance du principe de neutralité technologique devient une pierre angulaire pour comprendre les droits d’auteur qui sont attachés à ces nouveaux objets numériques et aux transactions qui les concernent. Fort heureusement, les questions relatives à la musique numérique, à son partage et sa diffusion ont pavé la voie en permettant de repenser les droits d’auteur dans un contexte du numérique. Nous notons par ailleurs que dans des marchés numériques de NFT qui se veulent décentralisés et déréglementés, les droits associés à la propriété intellectuelle sont pour l’instant les seules balises qui sont réellement respectées par les plateformes d’échange et qui appellent à une certaine intervention des propriétaires de ces plateformes. 2022 CSC 30. L.R.C. (1985), c. C-42 (ci-après la « LDA »). R.T. Can. 2014 no 20 (ci-après le « Traité »). L.C. 2012, c. 20 (ci-après la « LMDA »). Entertainment Software Association c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 34. Rogers Communications Inc. c. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 35. Commission du droit d’auteur du Canada, 2017 CanLII 1528886 (ci-après la « Décision de la Commission »). Cour d’appel fédérale, 2020 CAF 100 (ci-après l’« Arrêt de la CAF »). Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65. Arrêt SOCAN, par. 56. Idem, par. 59. LDMA, préambule. Arrêt SOCAN, par. 70, italique de la CSC. Idem, par. 44-45. Idem, par. 46-48. Idem, par. 74-75. Idem, par. 88. Idem, par. 90. Idem, par. 101 et 108. Idem, par. 91-94. Idem, par. 95 et 99-100.

    Lire la suite