Dans le cadre de contrats de services informatiques, il est fréquent de retrouver une clause de limite de responsabilité de la part des sociétés qui fournissent des logiciels et des services professionnels reliés à l’implantation ou à l’intégration de solutions informatiques.
Question
Une telle clause limitative de responsabilité prévue à un contrat est-elle valide en droit civil québécois lorsqu’il est question de manquement à une obligation essentielle?
Dans la décision 6362222 Canada inc. c. Prelco inc. récemment rendue, la Cour suprême du Canada statue que la clause limitative de responsabilité a été librement négociée entre les parties, résultat de compromis accordés de part et d’autre, et qu’elle doit être respectée.
L’intimée « Prelco » a mandaté l’appelante « Créatech » pour la fourniture de logiciels et de services connexes dans le but d’implanter un système de gestion intégré (afin de permettre de gérer et de suivre l’ensemble des informations et services opérationnels qui se trouvaient alors dans un grand nombre de bases de données). À la lumière de nombreux problèmes récurrents lors de l’implantation du système, Prelco décide de mettre fin aux relations contractuelles avec Créatech et confie à une autre compagnie la tâche de rendre le système opérationnel. Prelco poursuit alors Créatech en dommages-intérêts alors que Créatech dépose de son côté une demande reconventionnelle pour obtenir le solde impayé pour le projet. Une longue bataille judiciaire débute et se rend jusqu’en Cour suprême.
La Cour suprême a traité dans son jugement de divers arguments qui, selon la cliente Prelco, auraient écarté la clause de limite de responsabilité. La Cour rejette ces arguments.
Réaffirmation de la primauté de la liberté contractuelle
La Cour suprême du Canada considère que l’économie du Code civil est de prévoir la liberté de contracter des parties. Cette économie tend vers un équilibre entre la notion d’ordre public et le principe de la liberté contractuelle.
En examinant les principes de droit applicables, les juges soulignent toutefois que le principe de respect de la volonté contractuelle des parties comporte des exceptions, par exemple lorsqu’il y a faute lourde ou intentionnelle, lorsqu’il existe un déséquilibre entre les forces économiques (contrat entre un commerçant et un consommateur), dans le cadre de contrats d’adhésion et à l’égard d’autres types de contrats spécifiquement stipulés dans le Code civil ou pour l’exclusion de responsabilité pour un préjudice corporel ou moral.
Conclusion
Il apparaît au terme de cette décision que le choix du régime québécois est des plus intéressants pour les fournisseurs de services informatiques ou autres fournisseurs de services qui ont avantage à prévoir dans leur contrat l’application du droit québécois si une clause de limitation ou d’exclusion de responsabilité est négociée entre les parties.