Le 12 juin 2018, la Loi sur les normes du travail (« LNT ») a été modifiée dans le but d’offrir aux employés plus de flexibilité afin de favoriser une plus grande conciliation travail-famille. Parmi l’ensemble des modifications apportées à la Loi sur les normes du travail (« LNT »), voici un aperçu des principaux changements dignes de mention.
L’aide-mémoire précise si les modifications présentées entrent en vigueur le 1er janvier 2019. Dans le cas contraire, elles sont déjà effectives depuis le 12 juin 2018.
Interdiction de disparités sur la base du statut d’emploi
Pour les salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement, le taux de salaire, la durée du congé annuel et le mode de calcul de l’indemnité afférente ne peuvent être différents uniquement en raison du statut d’emploi.
À titre d’exemple, un salarié temporaire et un salarié régulier effectuant les mêmes tâches dans le même établissement devront recevoir une rémunération calculée selon le même taux de salaire.
Interdiction de disparités eu égard à la date d’embauche
Bonification de la protection existante contre la disparité des conditions de travail fondée sur la date d’embauche des salariés effectuant les mêmes tâches dans un même établissement.
Les régimes de retraite et autres avantages sociaux s’ajoutent à la liste des conditions de travail ne pouvant faire l’objet de disparité, telles que le salaire, la durée du travail et les différents congés prévus par la Loi sur les normes du travail (« LNT »).
(Les employeurs qui ont mis en place, avant le 12 juin 2018, des régimes de retraite ou d’avantages sociaux prévoyant des distinctions selon la date d’embauche des employés ne seront pas tenus de les modifier.)
Le salarié qui croit être victime d’une disparité de traitement relative à des régimes de retraite ou à d’autres avantages sociaux peut déposer une plainte à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) dans les 12 mois de la connaissance de cette disparité.
(Cet amendement n’interdit pas les distinctions en fonction du statut d’emploi. Deux salariés au statut différent pourront encore avoir droit à des avantages sociaux et des régimes de retraite différents, sous réserve des recours possibles suivant la Charte des droits et libertés de la personne (ex. : discrimination fondée sur l’âge, la condition sociale, etc.).
Heures supplémentaires
Un salarié peut désormais refuser de travailler plus de deux heures au-delà de ses heures habituelles quotidiennes de travail (au lieu de quatre heures)
Un employeur ne peut ainsi obliger un salarié à travailler plus de deux heures supplémentaires, à moins de circonstances particulières prévues par la Loi sur les normes du travail (« LNT ») et qui permettent à un employeur d’exiger une prestation de travail :
- Danger pour la vie, la santé ou la sécurité des travailleurs ou de la population
- Risque de destruction ou de détérioration grave de biens meubles ou immeubles
- Autre cas de force majeure
- Contravention au code de déontologie professionnelle du salarié
Horaire de travail
Un salarié pourra refuser de travailler lorsqu’il n’a pas été informé au moins cinq jours à l’avance qu’il devrait le faire.
Un employeur ne peut donc pas obliger un salarié à travailler à moins de cinq jours de préavis, sauf dans les circonstances particulières prévues par la Loi sur les normes du travail (« LNT ») :
- Prolongation d’une durée maximale de deux heures de son quart de travail (voir section précédente - Heures supplémentaires)
- Salarié tenu de rester en disponibilité en raison de la nature de ses fonctions
- Travailleur agricole (ex. : tâches liées à la semence, à la récolte, à la surveillance et à l’entretien de la production agricole)
- Danger pour la vie, la santé ou la sécurité des travailleurs ou de la population
- Risque de destruction ou de détérioration grave de biens meubles ou immeubles
- Autre cas de force majeure
- Contravention au code de déontologie professionnelle du salarié
Important : cette modification octroie aux salariés un droit de refus, mais n’impose pas une obligation aux employeurs de fournir aux salariés leur horaire de travail cinq jours à l’avance |
Étalement des heures de travail
Possibilité de convenir avec un salarié (non syndiqué), de façon individuelle, d’un étalement des heures de travail sur plus d’une semaine aux fins du calcul des heures supplémentaires, sans autorisation préalable de la CNESST.
Cette entente doit respecter les conditions suivantes :
- L’entente est conclue par écrit.
- L’étalement des heures de travail se fait sur une période maximale de quatre semaines.
- Chaque semaine de la période d’étalement déterminée ne dépasse pas de plus de 10 heures la semaine normale de travail dans l’entreprise, soit 40 heures pour la majorité des salariés.
- La moyenne hebdomadaire des heures de travail de la période d’étalement n’excède pas la durée de la semaine normale de travail, soit d’habituellement 80 heures sur une période d’étalement de deux semaines, par exemple.
- L’entente écrite prévoit que chaque partie peut y mettre fin par un préavis de deux semaines avant la fin de cette entente.
Malgré cette nouveauté offerte par la Loi sur les normes du travail (« LNT »), un employeur peut toujours demander l’autorisation de la CNESST afin d’étaler les heures de travail de l’ensemble de ses salariés. La Politique sur l’étalement des heures de travail de la CNESST est alors applicable et prévoit des modalités d’admissibilité plus restrictives. |
Violence conjugale ou violence à caractère sexuel
Les salariés victimes de violence conjugale ou de violence à caractère sexuel ont droit à un congé pouvant aller jusqu’à 26 semaines sur une période de 12 mois, au même titre que les salariés absents pour cause de maladie, de don d’organes ou de tissus, d’accident ou d’acte criminel.
- Même si le salarié n’a pas trois mois de service continu (Entrée en vigueur : 1er janvier 2019).
- Le lien d’emploi est maintenu pendant ce congé.
Rémunération des deux premiers jours d’absences pour cause de maladie, de don d’organes ou de tissus, d’accident, de violence conjugale, de violence à caractère sexuel ou d’acte criminel.
Maximum de deux jours de congés payés au cours d’une même année pour ces situations ainsi qu’en cas d’absence pour des raisons familiales et parentales (voir prochaine section).
Absences et congés pour raisons familiales et parentales
Bonification générale : certains congés sont reformulés de sorte qu’un salarié prenant soin d’un parent ou agissant comme « proche aidant » pourra bénéficier de ces congés et d’une plus longue période de protection de son lien d’emploi.
La période d’absence passe de 12 à 16 semaines sur une période de 12 mois lorsqu‘un salarié doit s’absenter en raison de l’état de santé d’un parent ou d’une personne pour laquelle il agit comme proche aidant.
- Ce congé est de 36 semaines lorsque le parent ou la personne est un enfant mineur. D’autres congés sont également bonifiés ou ajoutés, notamment lors de la disparition ou du décès d’un enfant mineur.
Rémunération des deux premiers jours d’absence pour obligations liées à la garde, à la santé ou à l’éducation de son enfant ou de l’enfant de son conjoint, ou en raison de l’état de santé de son conjoint ou d’un parent.
Tout salarié peut s’absenter dix jours par année pour remplir ses obligations familiales et parentales.
- Les deux premières journées prises annuellement seront payées
pour un salarié justifiant trois mois de service continu.
Maximum de deux jours de congé payés au cours d’une même année pour raisons familiales ou parentales ainsi que pour cause de maladie, de don d’organes ou de tissus, d’accident, de violence conjugale, de violence à caractère sexuel ou d’acte criminel (voir section ci-avant).
Autres congés liés aux obligations familiales et parentales
Absence autorisée pendant deux journées payées à l’occasion du décès ou des funérailles de son conjoint, de son enfant, de l’enfant de son conjoint, de son père, de sa mère, d’un frère ou d’une soeur (au lieu d’une journée), avec possibilité de trois autres journées sans salaire (au lieu de quatre)
- En cas de naissance, d’adoption ou d’interruption de grossesse, absence autorisée pour les deux premières journées payées, même si le salarié ne justifie pas de 60 jours de service continu
- Possibilité maintenue de trois autres journées sans salaire
Jours fériés
Indemnité afférente au jour férié ou congé compensatoire, mais au choix de l’employeur si le jour férié prévu par la Loi sur les normes du travail (« LNT ») ne coïncide pas avec l’horaire habituel de travail du salarié.
Vacances annuelles
Modification permettant à un salarié ayant trois années de service (au lieu de cinq) de bénéficier d’un congé annuel d’une durée minimale de trois semaines de vacances continues
- Malgré cet amendement, un salarié devra avoir complété la période de référence au cours de laquelle il aura atteint au moins trois ans de service pour bénéficier d’une troisième semaine de congé annuel
Politique de prévention et de traitement des plaintes
Obligation d’adopter une politique de prévention du harcèlement psychologique et de traitement des plaintes
- Harcèlement psychologique incluant les conduites à caractère sexuel
Modification du délai pour déposer une plainte pour harcèlement
Augmentation du délai de 90 jours à 2 ans depuis la dernière manifestation de la conduite alléguée
- Délai accru non applicable pour une plainte déposée ou prescrite avant le 12 juin 2018: Dinu et 9227-3754 Québec inc., 2018 QCTAT 4502
- Applicable au dépôt d’une plainte à la CNESST ou au dépôt d’un grief suivant la convention collective
Pratique de gestion à privilégier : veiller à documenter les incidents dénoncés, les décisions alors prises et leurs motifs, pour pouvoir utiliser les renseignements colligés dans la réponse à une plainte qui serait soumise plusieurs mois après les faits. |
Plainte à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) en cas de harcèlement sexuel
Après avoir obtenu le consentement du salarié concerné, la CNESST doit transmettre à la CDPDJ toute plainte de harcèlement qui concerne une conduite à caractère discriminatoire.
Entrée en vigueur des dispositions à une date à déterminer (réglementation requise au préalable)
Protection accrue des travailleurs embauchés par l’entremise d’agences de placement de personnel et d’agences de recrutement de travailleurs étrangers temporaires
Agences tenues d’obtenir un permis
Agences de placement de personnel
Interdiction d’accorder à un salarié un taux de salaire inférieur à celui consenti aux salariés de l’entreprise cliente qui effectuent les mêmes tâches uniquement en raison de son statut d’emploi
Agence de placement de personnel et entreprise cliente solidairement responsables des obligations pécuniaires découlant de la Loi sur les normes du travail (« LNT »)
Employeurs de travailleurs étrangers temporaires
Obligations additionnelles d’information auprès de la CNESST, par exemple en ce qui a trait à la durée du contrat et aux dates d’arrivée et de départ
En cas de poursuite pénale pour violation de la Loi sur les normes du travail (« LNT ») par une personne morale ou ses représentants :
Administrateur ou dirigeant de la personne morale présumé avoir commis lui-même une infraction à moins d’établir qu’il a fait preuve de diligence raisonnable.