L’intrusion de vapeurs

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Aux États-Unis, de nouvelles règles rendant obligatoire la prise en compte du risque d’intrusion de vapeurs dans le cadre de la réalisation d’une évaluation environnementale de site (EES) Phase I prendront effet prochainement. Les sociétés devraient dès maintenant passer en revue leur portefeuille immobilier afin de déterminer s’il y a des propriétés qui pourraient être à risque. Les financements hypothécaires et les ventes d’actifs au Canada seront vraisemblablement touchés par cette nouvelle norme de vérification diligente (qui comprend la vérification du risque d’intrusion de vapeurs) dans un avenir rapproché.

CE DONT IL EST QUESTION

La notion d’intrusion de vapeurs vise le cas où des sols ou de l’eau souterraine contaminés émettent des vapeurs qui migrent vers un terrain adjacent ou pénètrent à l’intérieur d’un bâtiment.

Une EES Phase I est une étude dont le but est de déterminer si l’usage actuel ou passé d’un terrain ou d’un terrain avoisinant peut avoir contaminé les sols ou l’eau souterraine. Le chargé de projet passe en revue la documentation afférente à la propriété ainsi que les renseignements que renferment les registres gouvernementaux à son égard et effectue une inspection du site. S’il conclut que le terrain risque d’être contaminé, il en fait mention dans son rapport. Un échantillonnage des sols et de l’eau souterraine, pour analyse en laboratoire, peut s’ensuivre, dans le cadre d’une EES « Phase II ».

CE QUE VOUS VOUS DEVEZ DE SAVOIR

Lorsqu’on pénètre dans un sous-sol entouré de terre contaminée par des hydrocarbures — un dégât causé par un ancien réservoir souterrain d’huile à chauffage, par exemple — on sent normalement les vapeurs d’hydrocarbures. Celles-ci sont donc détectées par « olfaction » et notées par le chargé de projet dans le cadre d’une EES Phase I. Mais, il existe également des contaminants sans odeur, dont la présence à l’extérieur du bâtiment et dans l’air intérieur ne peut être confirmée qu’au moyen d’équipements spécialisés. On exigera dorénavant du chargé de projet qu’il se prononce à l’égard du risque que de tels contaminants soient présents. Dans l’affirmative, il recommandera un échantillonnage de l’air intérieur. Cette analyse n’est pas sans difficulté, car les substances détectées pourraient être dégagées par des objets qui se trouvent dans le bâtiment lui-même et non dans le sol ou l'eau souterraine.

Évidemment, ce n’est pas parce qu’on ne peut sentir une substance qu’elle n’est pas présente; le trichloroethylène que l’on retrouve dans des solvants en est un exemple. Les solvants sont notamment associés au nettoyage à sec car ils servent à enlever les taches. Ils continuent à être utilisés dans toutes sortes d’applications industrielles, notamment où on doit laver des planchers, murs, équipements, camions et autres objets qui sont enduits de graisse. Ils sont présents dans de nombreux sites contaminés à l’échelle planétaire et, dans bien des cas, la contamination n’a pas encore été détectée. Les terrains contaminés par des solvants sont plus difficiles à décontaminer que ceux affectés par des hydrocarbures. La décontamination est souvent une opération de longue haleine et très dispendieuse. Qui plus est, ces terrains sont source d’inquiétude en ce qui concerne la santé humaine en raison des effets possibles associés à l’exposition (inhalation, eau de consommation, etc.) aux contaminants qui ont pénétré les immeubles. Aux États-Unis, certains États prélèvent une taxe sur le nettoyage à sec afin de contribuer au financement de la réhabilitation des terrains contaminés par des solvants.

POURQUOI C’EST IMPORTANT

Aux États-Unis, l’acquéreur d’un terrain à des fins commerciales devra faire une EES Phase I afin de s’acquitter de l’obligation de vérification diligente qui lui est imposée, selon les critères de « all appropriate inquiries ». En ajoutant l’intrusion de vapeurs à la liste des éléments dont les acquéreurs doivent s’enquérir, on les forcera dorénavant à affronter le risque dans le cadre de leur vérification diligente préachat au lieu de déposer des poursuites après coup. Cela aura des effets sur les opérations commerciales.

L’exigence de se satisfaire de l'existence d’un risque d’intrusion de vapeurs, exigence qui ne tardera pas à faire son apparition au Canada, aura des incidences dans les domaines suivants : environnement,assurances, litige civil et commercial, financement, fusions et acquisitions, et valeurs mobilières. Elle se traduira par une augmentation du risque juridique dans les domaines du droit pénal (environnement, santé et sécurité) et civil (contractuel et délictuel, avec et sans faute). Par ailleurs, si une contamination est confirmée, cela aura une incidence sur la valeur de la propriété et parfois même de l’entreprise, exposant de ce fait les administrateurs et dirigeants à des ordonnances de décontamination à titre personnel et à d’autres types de réclamations.

Le Conseil canadien des ministres de l’environnement vient de publier un « Protocole d’élaboration de recommandations pour la qualité des vapeurs des sols en vue de prévenir leur inhalation par l’humain. » Quelques provinces ont émis des documents d’orientation à ce sujet. Il est à prévoir que les nouvelles règles pour la Phase I aux États-Unis ne tarderont pas à être intégrées à la norme Z768-01 de CSA au Canada, avec le résultat qu’à plus ou moins long terme, la découverte de terrains contaminés par des substances difficiles à éliminer ira en augmentant, menant à des problèmes lors de vente de terrains et de financement des opérations commerciales, à une augmentation dans le passif environnemental à inscrire aux états financiers et enfin à des risques financiers et légaux accrus pour les sociétés et les particuliers.

La prudence est donc de mise!

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