Au cours de la dernière année et demie, le législateur s’est attardé à la sécurité liée aux bâtiments, afin d’assurer la sécurité des occupants, des personnes qui fréquentent ces bâtiments et des personnes qui peuvent être exposées à certains dangers en raison d’un équipement rattaché à ces bâtiments.
Ainsi, le 18 mars 2013 entrait en vigueur le Règlement visant à améliorer la sécurité dans le bâtiment qui est devenu le chapitre VIII intitulé « Bâtiment » du Code de sécurité adopté en vertu de la Loi sur le bâtiment.
Le chapitre « Bâtiment » du Code de sécurité (« CBCS ») prévoit des règles sur l’entretien des façades de bâtiments et des parcs de stationnement étagés en béton en plus de contenir diverses règles de sécurité incendie qui doivent entrer en vigueur progressivement entre le 18 mars 2013 et le 18 mars 2018.
D’ailleurs, depuis le 18 mars 2014, certaines dispositions additionnelles en matière de sécurité incendie sont en vigueur pour les lieux de sommeil couvert par le CBCS (soit certains hôtels, motels, immeubles à logements, copropriétés, résidences pour aînés et établissements de soins). Les dispositions en vigueur depuis le 18 mars 2014 visent sommairement les avertisseurs de fumée, les avertisseurs de monoxyde de carbone et l’éclairage de sécurité.
Le reste des dispositions prévues au CBCS en matière de sécurité incendie entreront en vigueur les 18 mars 2016 et 18 mars 2018. Ces nouvelles dispositions pourraient impliquer des modifications importantes et des coûts significatifs pour les propriétaires des bâtiments assujettis. L’entrée en vigueur progressive des dispositions vise à permettre aux propriétaires concernés de se préparer en conséquence.
TOURS DE REFROIDISSEMENT À L'EAU
Le 12 mai 2013, marquait l’entrée en vigueur du Règlement modifiant le Code de sécurité concernant les dispositions visant les tours de refroidissement à l’eau. Ces dispositions ont également été insérées dans le CBCS.
Ces dispositions prévoient de nouvelles obligations pour les propriétaires des tours de refroidissement, notamment la mise sur pied d’un programme d’entretien préventif élaboré par un professionnel, la tenue d’un registre où sont consignées les informations relatives aux tours et la transmission de certains renseignements à la Régie du bâtiment du Québec (« RBQ »). L’entrée en vigueur de ces dispositions faisait suite à l’épisode de légionellose vécu pendant l’été 2012 alors qu’aucun cadre réglementaire ne régissait l’entretien des tours de refroidissement à l’eau et qu’il n’y avait aucun registre permettant de localiser les tours de refroidissement en opération.
Les dispositions entrées en vigueur en mai 2013 étaient sommaires, se résumaient à 6 articles, et ne contenaient aucune précision quant aux normes et méthodes à respecter en matière d’entretien des tours de refroidissement.
Or, le 28 mai 2014, la Gazette officielle du Québec publiait une « mise à jour » du Règlement modifiant le Code de sécurité. Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur le 12 juillet 2014. Elles traitent précisément des méthodes à suivre pour l’entretien des tours de refroidissement. Il s’agit en quelque sorte de la phase 2 des dispositions concernant l’entretien des tours de refroidissement à l’eau. On y retrouve des mesures additionnelles précises concernant la procédure de maintien de la qualité de l’eau et la fréquence du prélèvement des échantillons. Les dispositions les plus contraignantes pour les propriétaires des tours concernent l’obligation de faire analyser à tous les mois les échantillons par un laboratoire accrédité par le Centre d’expertise en analyse environnementale du Québec pour en déterminer leur concentration en Legionella pneumophila. Le projet de Règlement annonçait que les nouvelles dispositions impliqueraient des coûts pour les entreprises qui sont propriétaires des tours. Le coût d’une analyse par un laboratoire accrédité est d’environ 250 $, c’est-à-dire des coûts annuels d’environ 3 000 $.
La plupart des mesures prévues aux nouvelles dispositions figuraient déjà au guide sur l’entretien des tours de refroidissement à l’eau publié en mai 2013 et qui se retrouvait sur le site Internet de la RBQ. Puisque celles-ci font maintenant partie du Règlement modifiant le Code de sécurité publié le 28 mai 2014, elles seront dorénavant obligatoires.
De plus, les nouvelles dispositions précisent qu’il incombe aux propriétaires des tours de s’assurer d’obtenir tous les résultats d’analyses effectuées par le laboratoire accrédité. Les propriétaires des tours doivent aussi s’assurer que le laboratoire accrédité achemine à la RBQ tous les résultats d’analyses effectuées dans les 30 jours suivant la date du prélèvement.
Les nouvelles dispositions imposent également aux propriétaires l’obligation d’obtenir le résultat du laboratoire accrédité sans délai ou le jour ouvrable suivant le résultat des analyses lorsque le résultat de ces analyses indique une concentration de Legionella pneumophila égale ou supérieure à 10 000 UFC/L et lorsque la quantification de la concentration de Legionella pneumophila est impossible à déterminer.
Les dispositions prévoient enfin des mesures immédiates à prendre par les propriétaires lorsque la concentration de Legionella pneumophila est de 1 000 000 UFC/L ou plus notamment l’obligation de s’assurer que la RBQ et le Directeur de Santé Publique de la région où est située la tour obtiennent le résultat du laboratoire accrédité sans délai.
La Loi sur le bâtiment prévoit plusieurs sanctions et dispositions pénales en cas de non-respect des mesures visant les tours de refroidissement. Rappelons que la RBQ a effectué plus de 1 900 inspections des tours de refroidissement à l’eau depuis 2012 et que, grâce au registre dont la RBQ bénéficie maintenant, celle-ci sait précisément où se trouvent les tours de refroidissement. Il est donc essentiel de respecter les nouvelles mesures pour éviter toute sanction.
Au-delà des mesures qui peuvent être imposées par la RBQ (y compris un avis de correction et l’obtention d’une ordonnance enjoignant à une personne de se conformer à la Loi dans un délai précis), la RBQ peut aussi ordonner l’arrêt de fonctionnement des tours. Des sanctions allant de 3 000 $ à 15 000 $ sont prévues pour les propriétaires qui refusent de se conformer à la Loi et aux ordonnances. En cas de récidive, les montants des sanctions peuvent être multipliés par 10.
AMIANTE
Le 6 juin 2013, marquait l’entrée en vigueur du Règlement modifiant le Règlement sur la santé et la sécurité du travail et le Code de sécurité pour les travaux de construction. La plupart des dispositions de ce Règlement forment maintenant la section IX.I intitulée « Dispositions sur la gestion sécuritaire de l’amiante » insérée dans le Règlement sur la santé et la sécurité du travail.
Ce règlement exige notamment que l’on procède à l’inspection de tout bâtiment construit avant le 15 février 1990 afin de localiser les flocages contenant de l’amiante et de tout bâtiment construit avant le 20 mai 1999 afin de localiser les calorifuges contenant de l’amiante. Les premières inspections à faire en vertu du règlement doivent être effectuées au plus tard le 6 juin 2015. Par la suite, à tous les deux ans, l’employeur doit vérifier les flocages et les calorifuges contenant de l’amiante, sauf s’ils sont entièrement enfermés dans un ouvrage permanent et étanche aux fibres et que l’accès n’est possible que par une opération destructive de l’ouvrage.
Il est important de noter que cette obligation incombe à l’employeur à l’égard de tout bâtiment sous son autorité. L’employeur peut évidemment être le propriétaire de l’immeuble, mais il n’est pas obligatoire qu’il le soit. Il pourrait par exemple être locataire ou gestionnaire, dès lors que le bâtiment est sous son autorité.
Le Règlement impose d’autres obligations aux employeurs dont notamment celle de dresser et de maintenir à jour un registre qui doit contenir des informations concernant les flocages et calorifuges. Le résultat des inspections faites par l’employeur doit aussi être consigné au registre. L’employeur doit mettre ce registre à la disposition des travailleurs et de leurs représentants qui oeuvrent dans son établissement.
On y prévoit également la méthode d’analyse des échantillons et la fréquence des inspections. Le Règlement prévoit aussi diverses mesures à prendre en cas de localisation de flocages et calorifuges. Aux termes de cette réglementation, on présume que tous les flocages et calorifuges contiennent de l’amiante et seule une analyse pourra démontrer le contraire.
Le règlement impose également à tout employeur, avant d’entreprendre un travail susceptible d’émettre de la poussière par une action directe ou indirecte sur tout bâtiment sous son autorité ou à l’intérieur de celui-ci, de vérifier la présence d’amiante dans les matériaux et les produits susceptibles d’en contenir. Il importe de préciser que, lorsque la présence d’amiante est détectée dans des matériaux ou produits, l’employeur doit les réparer ou les enlever en prenant compte des facteurs de dégradation et de dispersion.
Encore une fois, si le propriétaire d’un immeuble qui fait des travaux s’avère forcément visé par ces dispositions, un locataire, un gestionnaire ou un entrepreneur ayant l’autorité de faire des travaux sur un bâtiment pourrait aussi être visé et devoir assumer les dépenses qui en découlent.
CONCLUSION
Les nouvelles dispositions en matière de tours de refroidissement à l’eau et en matière d’amiante auront un impact financier pour les propriétaires des tours et, dans le cas de l’amiante, pour de nombreux employeurs qu’ils soient propriétaires, locataires, gestionnaires ou entrepreneurs. D’ailleurs, on peut facilement imaginer que la nouvelle réglementation concernant l’amiante aura un impact sur la négociation et la rédaction des contrats d’entreprise, des contrats de gestion immobilière et des baux commerciaux puisque les parties voudront départager les risques et préciser les responsabilités de chacun quant au respect de cette réglementation.
Écrit par
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Associée, Avocate